Quelles sont les origines du cannabis et du chanvre ?

Depuis des millénaires, certaines plantes ont accompagné l’humanité dans son évolution, jouant un rôle clé dans l’artisanat, la médecine et les traditions spirituelles. Leur histoire commence en Asie, où les premières traces d’utilisation remontent à plus de 8000 ans. En Chine, les fibres étaient utilisées pour fabriquer du textile et du papier, tandis que les graines servaient de source de nourriture et d’huile. Plus tard, elles se sont répandues en Europe et au Moyen-Orient, influençant les civilisations antiques grâce à leurs multiples usages. Entre traditions millénaires et controverses modernes, ces végétaux dont l'histoire a traversé les siècles, de la médecine ayurvédique indienne aux voiles des navires, ont façonné l’histoire maritime.

Aujourd’hui, avec l’essor du CBD et la redécouverte de leurs bienfaits, ces plantes connaissent un renouveau, notamment en France, où leur culture reprend une place centrale. Alors, prêt à explorer une histoire fascinante qui a marqué l’humanité ?

les origines du chanvre et du cannabis

Les premières traces du cannabis et du chanvre dans l’histoire

Les origines géographiques de ces plantes

Le chanvre et le cannabis font partie des premières plantes domestiquées par l’homme. Leur origine géographique est encore débattue, mais les découvertes archéologiques permettent de situer les premiers foyers d’utilisation en Asie centrale, autour du lac Baïkal, et en Chine, dans la région du fleuve Jaune. Ces zones abritaient des civilisations agricoles néolithiques qui ont su tirer parti des nombreuses propriétés de ces plantes.

En Chine, les traces les plus anciennes remontent à environ 8000 av. J.-C., avec la découverte de poteries décorées de fibres de chanvre sur le site de Xianrendong, dans le Jiangxi. De l’Europe au Japon, des vestiges encore plus anciens ont été mis au jour, prouvant que ces plantes ont accompagné les migrations humaines et l’essor des premières sociétés sédentaires.

Les premières utilisations par l’homme

Dès le Néolithique, le chanvre était cultivé pour ses fibres résistantes, utilisées dans la confection de textiles et de cordages. En Chine, on retrouve des écrits datant d’environ 2800 av. J.-C. qui mentionnent son usage dans la fabrication de vêtements et de filets de pêche. Les Chinois exploitaient également ses graines comme source de nourriture et d’huile.

Le cannabis, quant à lui, a rapidement suscité l’intérêt pour ses propriétés médicinales et psychoactives. L’Inde ancienne en faisait un usage spirituel et thérapeutique sous le nom de bhang, tandis que les peuples du Moyen-Orient l’incorporaient dans des remèdes naturels.

La Bible de Gutenberg, imprimée au XVe siècle, témoigne d’un autre usage du chanvre : le papier. Jusqu’au XIXe siècle, cette plante a joué un rôle clé dans le développement des grandes civilisations.

Le cannabis et le chanvre à travers les civilisations

Leur rôle dans les sociétés anciennes 

Le cannabis et le chanvre ont traversé les siècles en s'intégrant profondément dans diverses civilisations, chacune exploitant leurs propriétés selon ses besoins et croyances.

En Chine

Ces plantes occupaient une place centrale dès le IIIe millénaire av. J.-C. Le Shennong Bencao Jing, l’un des plus anciens traités de médecine chinoise, mentionne le chanvre pour ses vertus médicinales, notamment pour apaiser les douleurs et stimuler l’appétit. Les fibres de chanvre servaient également à fabriquer des vêtements, du papier et même des armures légères.

En Inde

Le cannabis tenait une place sacrée dans la tradition ayurvédique et spirituelle. Les textes védiques le considéraient comme une plante divine, associée à Shiva. Le bhang, une préparation à base de cannabis mélangé à du lait et des épices, était consommé lors de rituels religieux pour favoriser la méditation et la connexion spirituelle. Sur le plan thérapeutique, il était utilisé pour soulager le stress, les douleurs et les troubles digestifs.

Au Moyen-Orient

Le chanvre et le cannabis se sont diffusés par les routes commerciales reliant l’Asie à l’Europe. Les Perses et les Arabes les employaient à la fois pour leurs propriétés textiles et médicinales. Le médecin Avicenne, dans son Canon de la médecine au XIe siècle, documentait leurs effets analgésiques et anti-inflammatoires.

Par ailleurs, les fibres de chanvre étaient indispensables à la fabrication des cordages et des voiles de bateaux, un élément clé pour le développement du commerce maritime.

Leur expansion en Europe et en Amérique

Le chanvre et le cannabis ont progressivement conquis l’Europe grâce aux échanges commerciaux et aux migrations. Les Scythes, redoutables cavaliers nomades des steppes eurasiennes, ont largement contribué à leur diffusion. Des fouilles archéologiques menées en Sibérie ont révélé la présence de graines de chanvre dans des tombes datant du Ve siècle av. J.-C., prouvant son usage au sein de leurs rituels funéraires.

Durant l’Antiquité, les Grecs et les Romains ont adopté le chanvre pour ses applications textiles et médicinales. Hérodote mentionne son usage par les peuples de la mer Noire, tandis que Pline l’Ancien en décrit les bienfaits pour calmer les douleurs et traiter certaines affections cutanées. Au fil des siècles, le chanvre est devenu un élément clé de l’industrie textile européenne, particulièrement prisé pour la fabrication de vêtements et de cordes.

Avec l’essor des grandes explorations, le chanvre a traversé l’Atlantique pour atteindre l’Amérique. Les colons européens, conscients de son importance économique, l’ont introduit au XVIe siècle. Aux États-Unis, George Washington lui-même encourageait sa culture, tant pour ses applications agricoles que pour l’industrie du papier et des voiles.

Jusqu’au XIXe siècle, le chanvre dominait les cultures industrielles avant que le cannabis, sous sa forme récréative et médicinale, ne gagne en popularité.

De la Chine antique aux plantations américaines, en passant par les temples hindous et les bateaux arabes, le chanvre et le cannabis ont façonné l’histoire des civilisations. Leur rôle dans l’économie, la médecine et la spiritualité illustre leur incroyable adaptabilité et l’intérêt constant que l’humanité leur porte.

Les usages traditionnels du chanvre et du cannabis

Textiles, cordages et papier : l’importance du chanvre

Le chanvre a marqué l’histoire bien avant que le coton et les fibres synthétiques ne dominent l’industrie textile. Grâce à ses fibres résistantes et durables, il a servi à fabriquer des vêtements, des sacs et des voiles de bateau pendant des siècles.

En Chine, dès 2800 av. J.-C., les artisans tissaient déjà des étoffes en chanvre, appréciées pour leur robustesse. Les Égyptiens, quant à eux, l’utilisaient dans la confection de cordages pour leurs navires, profitant de ses propriétés imputrescibles.

Au-delà du textile, le chanvre a joué un rôle clé dans la production de papier. Contrairement aux fibres de bois, il possède une structure plus souple, facilitant sa transformation en pâte à papier. Les premiers documents imprimés en Chine, autour du IIᵉ siècle av. J.-C., étaient fabriqués à partir de fibres de chanvre.

Plus tard, au Moyen Âge, les scribes européens écrivaient sur des parchemins de papier de chanvre, assurant la transmission du savoir à travers les siècles.

Au XIXᵉ siècle, alors que le coton devenait l’étoffe dominante, le chanvre restait essentiel pour les industries navales et agricoles. La majorité des cordes, filets et voiles utilisés par les marins provenait encore de cette plante aux multiples usages.

Son déclin au XXᵉ siècle, dû à la montée des fibres synthétiques et aux législations restrictives, a réduit son importance dans l’industrie. Pourtant, avec la montée des préoccupations écologiques, il connaît aujourd’hui un renouveau, notamment dans la production de textiles durables et biodégradables.

Le cannabis dans la médecine et la spiritualité

Le cannabis ne s’est pas limité à un usage artisanal ou agricole : il a aussi occupé une place majeure dans les traditions médicinales et spirituelles de nombreuses civilisations. En Chine, les premiers écrits médicaux, attribués à l’empereur Shen Nong, mentionnent son usage pour soulager les douleurs et traiter des affections inflammatoires. Par exemple, l’huile de cannabis, obtenue à partir de ses graines, était utilisée pour apaiser les troubles digestifs et renforcer l’organisme.

En Inde, le Bhang, une boisson à base de lait et de cannabis, était consommée lors de rituels religieux dédiés à Shiva, considéré comme le dieu protecteur de cette plante. Les sages et ascètes hindous l’intégraient à leur méditation pour favoriser un état de relaxation et de clairvoyance. Ses vertus anesthésiantes étaient également reconnues : il servait à atténuer les douleurs menstruelles et les maux de tête.

Les cultures perses et arabes ont aussi intégré le cannabis à leur pharmacopée. Avicenne, dans son célèbre Canon de la médecine, recensait ses propriétés analgésiques et sédatives. Au Moyen-Orient, il était employé dans la préparation de remèdes pour calmer l’anxiété et favoriser le sommeil. Cette tradition a perduré à travers les siècles, influençant même certaines pratiques européennes avant l’interdiction progressive de la plante au XXᵉ siècle.

Le cannabis et le chanvre ont donc façonné des pans entiers des sociétés anciennes, autant sur le plan matériel que spirituel. Leur redécouverte aujourd’hui, notamment dans les domaines du bien-être et des soins naturels, s’inscrit dans une quête de solutions plus respectueuses du corps et de l’environnement.

De la prohibition à la redécouverte du chanvre et du cannabis

Le déclin et l’interdiction au XXᵉ siècle

Le XXᵉ siècle marque un tournant majeur dans l’histoire du chanvre et du cannabis. Autrefois indispensables dans des domaines aussi variés que l’industrie textile, la médecine et la navigation, ces plantes subissent un déclin brutal sous l’effet d’une prohibition grandissante.

Aux États-Unis, la montée du puritanisme et l’échec de la prohibition de l’alcool dans les années 1920 poussent les autorités à chercher de nouveaux boucs émissaires. Le cannabis devient alors la cible de vastes campagnes de désinformation.

Dès les années 1930, des slogans comme Marijuana is Devil inondent l’espace médiatique, associant la consommation de cannabis à la criminalité et à la décadence morale. La presse et le cinéma, avec des films comme Reefer Madness, alimentent cette peur collective.

En 1937, le Marijuana Tax Act interdit pratiquement toute utilisation du chanvre et du cannabis aux États-Unis. La France et d'autres pays suivent cette tendance en adoptant des réglementations de plus en plus strictes, reléguant ces plantes à un statut purement illicite.

Parallèlement, l’essor des fibres synthétiques comme le nylon, soutenu par l’industrie pétrochimique, accélère le déclin du chanvre dans les usages industriels. Dans le domaine médical, l’apparition de nouveaux médicaments comme l’aspirine et la morphine réduit l’intérêt pour les usages thérapeutiques du cannabis. En quelques décennies, cette plante autrefois omniprésente disparaît presque totalement de l’économie légale.

Le retour du chanvre industriel et du cannabis thérapeutique

Il faut attendre la seconde moitié du XXᵉ siècle pour voir émerger un mouvement de redécouverte du chanvre et du cannabis. Durant les années 1960 et 1970, les mouvements contre-culturels remettent en question les dogmes établis et revendiquent un retour à des solutions naturelles, y compris pour la santé.

Des études scientifiques commencent à analyser sérieusement les propriétés du CBD et des autres cannabinoïdes, démontrant leur potentiel dans le traitement de divers troubles, comme l’épilepsie et la douleur chronique.

Sur le plan industriel, la crise environnementale et la nécessité de trouver des alternatives durables redonnent au chanvre une place de choix. En France, une relance progressive de la culture du chanvre s’observe dès les années 1990, notamment pour la fabrication de papier, d’isolants écologiques et de textiles biosourcés. Aujourd’hui, la France est même le leader européen de la production de chanvre avec près de 50 000 tonnes produites par an.

Le cannabis thérapeutique connaît lui aussi une réhabilitation progressive. Plusieurs pays, dont le Canada et certains États américains, légalisent son usage médical, ouvrant la voie à de nouvelles recherches et à des applications concrètes. En France, bien que la législation reste stricte, des expérimentations sont en cours pour évaluer l’intérêt du cannabis médical dans le traitement de certaines pathologies.

Le CBD, lui, bénéficie d’une régulation plus souple, ce qui permet son essor fulgurant ces dernières années. Recherché pour ses propriétés relaxantes, anti-inflammatoires et anxiolytiques, il devient une alternative naturelle aux traitements classiques contre le stress et la douleur. Que ce soit sous forme d’huiles, de fleurs ou de résines, il répond aux attentes d’un public en quête de solutions naturelles et efficaces.

Après un siècle de prohibition, le chanvre et le cannabis retrouvent ainsi peu à peu leur place dans nos sociétés. Qu’il s’agisse de bien-être, de textile ou d’écologie, ces plantes aux multiples usages démontrent qu’elles n’ont pas dit leur dernier mot.

L'histoire du CBD en quelques points

Le CBD (cannabidiol), principal dérivé légal du Cannabis sativa, a commencé à être commercialisé à grande échelle début 2010, bien que son histoire scientifique et médicale remonte à plusieurs décennies. Isolé pour la première fois en 1940 par le chimiste américain Roger Adams, il faudra attendre les travaux du chercheur israélien Raphael Mechoulam après 1960 pour que sa structure chimique et ses propriétés soient mieux comprises. Dès 1980, des études suggèrent ses effets potentiels sur l’épilepsie, mais son utilisation reste marginale.

C’est en 1996, avec la légalisation du cannabis médical en Californie, que l’intérêt pour le CBD commence à émerger, bien qu’il demeure dans l’ombre du THC. Il faut attendre le début des années 2010 pour que son usage se démocratise, notamment grâce à des recherches mettant en avant ses propriétés thérapeuthiques. L’histoire de Charlotte Figi, une fillette souffrant d’épilepsie sévère dont l’état s’améliore grâce au CBD, attire l’attention du grand public et des législateurs.

En 2018, un tournant majeur se produit avec l’adoption du Farm Bill aux États-Unis, qui légalise la culture du chanvre contenant moins de 0,3 % de THC. Cette décision ouvre la voie à une explosion du marché du CBD, qui commence à se diversifier avec des huiles, des cosmétiques, des infusions et d’autres produits bien-être.

En Europe, la commercialisation du CBD s’accélère après la décision de la Cour de justice de l’Union européenne en 2020, affirmant que cette molécule ne peut être considérée comme un stupéfiant.

Aujourd’hui, le CBD est devenu un produit incontournable du secteur du bien-être et de la santé alternative, porté par une réglementation plus souple dans de nombreux pays et un engouement croissant du public pour les solutions naturelles. Toutefois, il reste au cœur de nombreux débats juridiques et sanitaires, notamment sur son encadrement et ses véritables effets thérapeutiques.

 

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